Partie 2 : 1974 – La grève s’étend… ou était-ce encore une séance d’études ?

Dans le cadre de l’exploration continue de l’histoire de l’UCET, voici la première de trois parties d’un récit sur notre première grève.

Partie 1 : 1974 – Une vraie grève des pompiers ou… une simple séance d’études ?

En 1967, après des décennies de pressions politiques de diverses sortes et autres mouvements revendicatifs des associations du personnel, le Parlement adoptait le Projet de loi 170, la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, qui accordait – enfin — aux fonctionnaires du gouvernement fédéral le droit de se syndiquer et de faire la grève, en cas de besoin. Ainsi, fini le temps d’aller ‘mendier’ une amélioration salariale et des avantages sociaux. Le pouvoir d’exiger des résultats se trouvait ainsi entre les mains des employé(e)s de la fonction publique fédérale.

Les fonctionnaires ne perdirent pas un instant pour signer une carte d’adhésion syndicale, ainsi dès septembre 1967, l’Alliance de la Fonction publique du Canada notifiait son avis de négociation pour les membres des groupes Chauffage et énergie (HP) et Pompiers (FR). Les toutes premières conventions collectives de l’AFPC furent signées en avril 1968 pour ces deux unités de négociation. Le nouveau syndicat, formé en 1966 seulement, ‘ne perdit pas de temps au démarrage’.

Parmi les 53 groupes relevant de ses compétences en 1968, l’AFPC n’en comptait que 8 ayant opté pour la conciliation/grève.  Les membres n’en avaient pas moins clairement indiqué, dès les premiers jours, qu’ils allaient prendre leur destin en main. La première grève de l’histoire de l’AFPC fut déclenchée au printemps 1970 par les agents des douanes au poste-frontière de Windsor-Detroit. L’année suivante, l’Union des employés de la Défense nationale déclencha la première grève légale contre Construction de Défense du Canada à deux endroits. Puis, au début des années 1970, les membres de l’Union canadienne des employés des transports entreprirent des moyens de pression au travail par le truchement de grèves sauvages.

PARTIE 2 : La grève s’étend… ou était-ce encore une séance d’études ?

Dans le cadre de l’exploration continue de l’histoire de l’UCET, voici la deuxième de trois parties d’un récit sur notre première grève.

Les frustrations refoulées ayant enfin un exutoire, la grève des pompiers commença à se propager. Une semaine plus tard, 36 pompiers quittèrent leur poste à Winnipeg. Le jeudi 11 avril, ceux d’Edmonton se joignirent à la grève. Don Duthie, président de la Section locale 20219, déclara alors : « C’est devenu une question de fierté maintenant, plus que d’argent. Vous ne pourriez pas faire reculer les gars avec un bulldozer ». Jeudi, l’injonction de la Cour fédérale expira sans qu’aucune mesure ne soit prise à l’encontre des membres.

Les pompiers ferment l’aéroport de Toronto, tel était la une du journal lorsque les membres quittèrent leur travail à midi le 11 avril. Ces membres rejoignirent leurs homologues de Halifax et de Fredericton, de Winnipeg, d’Edmonton et des 11 aéroports de la Colombie-Britannique, qui avaient tous laissé leur poste. En guise de réaction, le ministère des Transports interdit tous les vols commerciaux à destination et en provenance de l’aéroport de Toronto. Puis, en fin de journée, on apprit que les membres de Calgary avaient prévu une ‘séance d’études’ à 18 h, et qu’ils envisageaient de débrayer. La grève étant illégale en vertu de la loi, et qui plus est non autorisée par l’AFPC, les membres avaient pris l’habitude de qualifier leurs actions de ‘séances d’études’ plutôt que de parler de grèves. Mais chaque jour, les nouvelles rappelaient au public que le trafic aérien commercial au Canada était paralysé à cause de ces ‘séances d’études’ des pompiers.

L’offre du Conseil du Trésor portant sur une augmentation en quatre étapes jusqu’à hauteur de 1 200 $ par année dans le cadre d’une convention collective d’une durée de 26 mois, avait été recommandée par le Comité de négociation. Jim Wyllie, vice-président de l’AFPC, qui négociait alors pour les pompiers, déclara aux médias que le syndicat prenait des dispositions pour envoyer des trousses de ratification aux membres. Selon des rapports provenant de toutes les régions du pays, les sections locales, fortes de 1 436 pompiers d’aéroports fédéraux, rejetteraient l’offre du Conseil du Trésor. Dès la deuxième semaine des débrayages, l’aéroport de Montréal se joignit à la grève après que le Conseil du Trésor eut déclaré que le gouvernement fédéral ne pouvait pas améliorer son offre d’augmentation salariale. Les pompiers de l’aéroport de St. John’s à Terre-Neuve, déclarèrent qu’ils quitteraient le travail en signe d’appui à une augmentation de salaire.

Aux problèmes qu’avaient déjà le gouvernement fédéral vint s’ajouter le rejet par les contrôleurs aériens d’une offre salariale de 7,5 % la première année et de 7 % la deuxième, votant à 91 % pour donner à leur exécutif le pouvoir de déclencher une grève si nécessaire.

Une position forte

À l’issue des scrutins, il s’avéra que les pompiers avaient rejeté la proposition de règlement qui leur aurait donné une augmentation de salaire de 31,3 pour cent d’ici à juin 1976, faisant passer leurs rémunérations annuelles de 9 160 $ à 12 030 $. Les pompiers de l’aéroport de Vancouver firent savoir qu’ils accepteraient les 12 000 $ maintenant et 500 $ de plus dans un an, mais le gouvernement ne réagit pas à leur déclaration.

Lorsque le président du Conseil du Trésor, Bud Drury, se rendit à Victoria pour s’adresser à la Chambre de commerce, il y fut accueilli par 60 pompiers du MDN qui dressèrent une ligne de piquetage lors du déjeuner. Les pompiers du MDN dans les aéroports de la Colombie-Britannique se joignirent à la grève. Dale Hitchen, un représentant du groupe du MDN, déclara que « l’objectif principal est de faire connaître à M. Drury le mécontentement des membres à l’égard des négociations de l’AFPC et de l’offre salariale du Conseil du Trésor. »

Le président du CT convoqua alors une réunion avec des représentants des ‘comités d’action’ des pompiers des aéroports de Victoria et de Vancouver, et de ceux du ministère de la Défense nationale à Esquimalt, mais ne parvint toutefois pas à apaiser leur colère. De retour à Ottawa, le ministre des Transports, Jean Marchand, déclara que si les 2 000 contrôleurs du pays se joignaient aux pompiers et déclenchaient une grève, tous les aéroports du Canada ‘seraient fermés’.

L’aéroport international de Toronto n’en continua pas moins à fonctionner malgré le débrayage des pompiers, mais les opérations furent réduites de 60 %, selon la direction. À Edmonton, les pompiers qui débrayèrent le samedi 13 avril firent savoir qu’ils envisageaient de rester dehors indéfiniment. Le délégué syndical de l’UCET, Ron Lovett, annonça que ses 35 membres étaient heureux de constater que les pompiers de l’aéroport international de Toronto s’étaient joints à l’arrêt de travail. Il indiqua que le mouvement de Toronto représentait un soutien considérable aux rangs croissants des pompiers d’aéroport maintenant en arrêt de travail à travers le Canada.

Pour mettre en perspective les frustrations des membres des aéroports fédéraux, il convient de rappeler que les relations de travail au pays n’étaient pas particulièrement bonnes au printemps 1974. Le quotidien de langue anglaise ‘The Ottawa Citizen’ consacra une pleine page spéciale de son édition du vendredi 19 avril aux problèmes syndicaux au Canada. Les travailleurs des postes, membres du STTP, étaient à cette époque en négociation. La médiation pour les contrôleurs du trafic aérien était en cours. Et les pilotes des Grands Lacs étaient en grève, le gouvernement menaçant de les obliger à reprendre le travail par voie législative.

Tom Stoyanoff qui organise une « séance d’étude » des pompiers à l’hôtel Avion de Toronto. (Toronto Star Geoff Goode 1974)

En raison des débrayages des membres de l’UCET, les vols à destination des aéroports de Toronto et de Montréal étaient détournés vers des aéroports beaucoup plus petits, comme celui d’Ottawa, dont le personnel était composé de pompiers militaires, toujours opérationnel de par ce fait. Le titre ‘Les séances d’études ne sont pas des grèves, selon les pompiers’ fit sourire, mais grève ou pas, ils n’occupaient pas à leurs postes aux aéroports.

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